Lait bio : la grande incertitude

Depuis quelques mois, en France, une partie du lait bio se retrouve déclassée en conventionnel, faute d’acheteurs pour ces produits plus chers. Difficile de prévoir si cette situation va perdurer.

Crise ou déséquilibre temporaire ? Les avis divergent selon les acteurs. Les collecteurs de lait bio, à commencer par le premier d’entre eux, Biolait, sont plutôt alarmistes et évoquent de «  nombreuses fermes en difficulté, qui pourraient être contraintes d’arrêter leur activité ». Du côté de la Fédération nationale d’agriculture biologique (Fnab), on préfère parler juste de « déséquilibre temporaire ».

Mais qu’il soit durable ou pas, le décrochage actuel entre l’offre et la demande de lait biologique fait très mal aux éleveurs et à leurs collecteurs directs : elle génère des déclassements pour les laiteries, et des baisses des prix payés aux producteurs (même si les laiteries font encore en partie « tampon »). Beaucoup d’entreprises appellent leurs producteurs à réduire leurs volumes et ralentissent ou arrêtent les conversions, pour éviter de dégrader encore la situation.

La production encore en forte hausse

Toutefois, selon les prévisions du Cniel, au vu des conversions déjà engagées, la production française de lait bio va continuer de croître : elle devrait atteindre 1,35 milliards de litres en 2022, soit une hausse de 22 % par rapport à la collecte 2020 (1,1 milliard). Le nombre de producteurs devrait quant à lui augmenter de 10 % pour passer à 4400 en 2022.

La dynamique de production de lait bio est « à peu près » prévisible, même si le facteur « pousse de l’herbe » joue beaucoup sur la production d’une année ; celle de la consommation l’est beaucoup moins. Il semble que 2020 ait été une très bonne année pour la consommation de produits laitiers bio : confinés chez eux, les Français ont acheté lait, crème, yaourts et beurre bio. La réouverture des entreprises, des restaurants et des cantines a sans doute ralenti cette consommation, mais d’autres facteurs ont pu jouer : la baisse du pouvoir d’achat de certains Français ou encore la concurrence par les laits « équitables », « de terroir », « de pâturage »… La consommation de produits laitiers bio a décroché nettement au premier semestre 2021, et est même passée, selon l’Idele, au-dessous de celle de 2019.  Ce qui est plutôt inquiétant…