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Prendre des congés, impossible ?

Cet éleveur laitier prend 4 à 5 semaines de congés par an. Pendant longtemps, prendre des vacances a été un tabou en agriculture et il le reste toujours un peu. Pourtant, certains agriculteurs osent dire que les congés sont normaux et légitimes. Et que leur travail n’en pâtit pas. Bien au contraire. Témoignage de Sylvain, producteur de lait.

Avant de s’installer sur une ferme laitière, Sylvain, 37 ans, a été salarié du secteur de l’alimentation animale. Pendant une dizaine d’années, il a parcouru la France, visité de nombreuses fermes, rencontré beaucoup éleveurs, et constaté que trop souvent, « ils galéraient sous le poids du travail ».

C’est pourquoi lorsqu’il s’est installé à son tour, en 2015, il ne voulait pas le faire à n’importe quel prix. Si l’exercice du métier au contact des animaux, et son côté « chef d’entreprise » lui plaisaient, il n’était pas prêt à tout lui sacrifier. Parce que pour lui, les week-ends et les vacances, c’était « essentiel ».

Vacances des agriculteurs : novateur ou essentiel ?

C’est du côté du Pays de Retz (44) que Sylvain a rencontré des éleveurs qui avaient la même préoccupation. Même pas des Nima (Non issus du milieu agricole) comme lui, mais des associés à la tête d’une belle structure, avec un parcellaire permettant de faire beaucoup de pâturage, de bons résultats techniques, une excellente rentabilité, et qui osaient parler « temps de travail et vacances » depuis une trentaine d’années. « À l’époque, c’était très novateur » souligne Sylvain.

Ça l’est toujours, car bon nombre d’agriculteurs ne prennent que peu de vacances. « C’est vrai que l’on peut se faire aspirer par le travail. Ou craindre d’être jugé par l’entourage », reconnaît Sylvain. Lui, gère son travail en arbitrant « ce qui est prioritaire et ce qui ne l’est pas. Il faut savoir prendre du recul ». Ce recul, justement, est permis par les temps de repos, week-ends et vacances…

Le Gaec de Sylvain compte trois associés et deux salariés (pour 200 vaches). « Nous sommes des tiers associés, sans lien familial, c’est plus facile ». Pour les week-ends, l’organisation se fait par binômes : « c’était important pour nous de ne pas travailler seul. Nous avons donc chacun un week-end sur deux ».

Chaque associé du GAEC fait part de ses attentes et on s’organise

Pour les vacances d’été, chaque associé prend deux semaines. Chacun prend aussi des jours à Noël et en février, lorsque la charge de travail est moins importante. Cette année, les associés sont même allés plus loin en prenant tout l’hiver un jour de congé par semaine. « Chacun fait part de ses attentes et on s’organise ». Et si jamais il y a conflit d’agenda, le Gaec ne s’interdit pas de faire appel à l’association de remplacement : « C’est arrivé l’été dernier ».

Si la volonté commune des associés est la base de cette organisation, Sylvain reconnaît qu’elle est possible parce qu’il y a plus de trois personnes à travailler sur la ferme : « Dans les Gaec à deux ou trois, quand l’un part en vacances, cela peut devenir trop lourd pour celui ou ceux qui restent ». C’est aussi parce que la charge de travail est raisonnable : « Partout où je suis allé, la bonne mesure, c’est 50 vaches par personne », et parce que la ferme est rentable, avec de bons résultats techniques et économiques… Mais il n’est pas impossible que ces bons résultats soient liés au fait que les associés sachent prendre du recul, des loisirs et des repos, et ainsi, se sentent mieux dans leur travail.

Partout où je suis allé, la bonne mesure,
c’est 50 vaches par personne